Mon pays, la Suisse, remercie la France de son initiative.
En fait, nous voulions nous rencontrer ici avec les parties au conflit afin de tracer un chemin commun, une perspective de paix durable. Nous nous retrouvons sans les dirigeants israéliens et palestiniens, ce qui témoigne de la difficulté de construire la confiance et le dialogue. Nous nous retrouvons aussi alors que la situation sur place se détériore et que l’on s’éloigne d’une solution.
Dès lors, la question fondamentale qui se pose à la communauté internationale est de savoir comment aider à reconstruire des perspectives, des espoirs réels. Ni plus, ni moins.
Cette conférence peut précisément aider. Elle est l’occasion pour la communauté internationale de réaffirmer haut et fort qu’une solution négociée fondée sur le paradigme des deux Etats constitue la seule voie praticable pour réaliser une paix juste et durable. Pour garantir la sécurité, la souveraineté et le respect des droits et des aspirations de chacun.
Certes, on ne peut pas imposer de l’extérieur une solution durable au conflit. Mais, par une attitude claire et unie, nous pouvons rendre les progrès possibles et renforcer les efforts constructifs.
Gouverner, c’est aussi montrer aux citoyens quelles sont les perspectives politiques. Nous appelons les dirigeants des deux parties au conflit à prendre des mesures pour renforcer la confiance et promouvoir la solution des deux Etats ; en tous les cas, à s’abstenir de porter encore davantage préjudice à cette solution et de préjuger des résultats d’un accord sur le statut permanent.
S’ils le veulent, le gouvernement israélien et les dirigeants palestiniens peuvent ainsi rouvrir des perspectives.
Du côté israélien tout d’abord, il s’agirait de ne pas poursuivre la colonisation en Cisjordanie et à Jérusalem-Est. Donc de ne pas construire un obstacle à la paix et à la solution des deux Etats. A l’instar du Conseil de sécurité qui l’a réaffirmé dans sa résolution 2334, la Suisse considère les colonies comme illégales au regard du droit international. Dès lors, la Suisse ne reconnaîtra pas un changement aux frontières de 1967, y compris concernant Jérusalem, à moins qu’il ne résulte d’un accord négocié entre les parties.
Israël est aussi invité à jouer davantage la carte économique, à accroître le flux de biens et de personnes entre Gaza, Israël et la Cisjordanie. C’est en combattant le chômage qui atteint 50% de personnes à Gaza que l’on reconstruit des perspectives. C’est aussi en prenant de vigoureuses mesures de redressement économique en zone C que l’on peut redonner l’espoir manquant aux Palestiniens de Cisjordanie.
Du côté des dirigeants palestiniens, rouvrir des perspectives passe d’abord par une prise de position ferme contre toute incitation à la violence. Et puis il faut un véritable engagement pour l’unité palestinienne, en faveur d’une autorité légitime et efficace, en mesure de parler et de négocier d’une seule voix au nom de tous les Palestiniens. La division entre Ramallah et Gaza affaiblit le discours des forces modérées et freine le développement social et économique, en particulier à Gaza. L’espace démocratique se réduit, de même que la confiance des Palestiniens dans leurs institutions. Bref, il ne faut plus attendre pour tenir des élections palestiniennes, locales puis générales.
C’est pour cela que la Suisse s’engage depuis longtemps et va poursuivre ses efforts, de concert avec les acteurs locaux, régionaux et internationaux, visant à créer les conditions d’une réunification inter-palestinienne.
Toujours dans cette optique de rouvrir des perspectives pour la solution des deux Etats, les acteurs de la société civile israélienne et palestinienne ont un rôle capital à jouer. Un Groupe sur la Société Civile pour le Processus de Paix s’est réuni à diverses reprises ces derniers mois sous les auspices de la Suède. La Suisse salue l’établissement d’un Forum sur la société civile. Pour vivre en paix, il faut promouvoir un dialogue intense entre les organisations israéliennes et palestiniennes.
Dans ce cadre, diverses ONG, et notamment l’Initiative de Genève, pourront agir concrètement pour la réconciliation entre les sociétés israélienne et palestinienne, pour partager les récits des uns et des autres sur les origines du conflit et pour envisager le rôle des jeunes et des femmes dans la résolution des problèmes.
Enfin, l’établissement d’un cadre politique régional et international et de paramètres clairs en vue de la relance du processus de paix est nécessaire. Parce que les principaux acteurs régionaux et internationaux sont directement concernés par exemple par le règlement de la question des réfugiés palestiniens. Ces mêmes acteurs ont par ailleurs un rôle cardinal à jouer en termes d’incitations économiques, politiques et sécuritaires. Ainsi, l’initiative de paix arabe mériterait depuis longtemps d’être mieux exploitée.
Dans les années à venir, au lieu de multiplier les conflits, il faut promouvoir la coopération régionale au Proche et Moyen-Orient. La Suisse, qui est habituée à construire des ponts dans le monde entier, est constamment prête à participer à ces efforts, à apporter des contributions spécifiques, en particulier dans la promotion du dialogue régional. C’est aussi ainsi que l’on peut aider à reconstruire des perspectives et des espoirs réels.