Les débuts des partenariats et l’établissement de la Mission suisse auprès de l’OTAN
«La Suisse envisage d'envoyer des représentants permanents auprès du quartier général de l'OTAN à Bruxelles et auprès de l’organe de coordination du Partenariat à Mons.» C'est par cette phrase sibylline en fin du document de présentation suisse à l’intention du Partenariat pour la Paix (PpP) que l'existence de la Mission suisse auprès de l'OTAN a débuté.
L'ouverture d'un poste de liaison était explicitement proposée dans le document cadre fourni par les Alliés aux Etats nouvellement partenaires. Etablie en 1997 dans des bureaux mis à disposition par l’OTAN dans son périmètre sécurisé, dans l’immeuble «Manfred Wörner», du nom de l’ancien ministre de la défense allemand qui fut Secrétaire Général de l’OTAN de 1988 à 1994. La Mission auprès de l’OTAN présente plusieurs caractéristiques uniques dans le réseau diplomatique suisse. Elle a la charge de représenter la Suisse, neutre, vis-à-vis d'une organisation politico-militaire basée sur un engagement de défense mutuelle. Le DDPS, encore plus que le bureau d’un attaché de défense, lui fournit toute une division militaire dirigée par un officier général. De plus, c’est une mission «transatlantique» puisque du personnel qui y est rattaché a pour lieu de travail non seulement la Belgique (au siège de l’OTAN et auprès du commandement militaire de Mons-SHAPE), mais aussi les Etats-Unis (au commandement «transformation» à Norfolk-ACT, Virginie).
L’établissement de liens institutionnels entre la Suisse et l’OTAN coïncide avec l’apparition de nouveaux rapports en matière de sécurité sur le continent, englobant aussi bien les acteurs de la guerre froide tout juste finie, y compris les anciennes républiques soviétiques devenues indépendantes, que les pays neutres européens. C’est l’époque qu’on pourrait appeler la décennie de sécurité coopérative européenne. Alors qu'elle était avant tout une organisation de défense collective, l'OTAN commence à participer à la gestion multilatérale de la sécurité. Devant l’urgence d’endiguer les conflits dans les Balkans, il est apparu que l'Alliance est la seule organisation européenne en mesure de mettre des moyens militaires à disposition pour la gestion des crises. Pour la Suisse également, cette période a amené des changements politiques conséquents en matière de sécurité. Décidée en 1999, la participation de la Suisse à l'opération KFOR de stabilisation au Kosovo, conduite par l'OTAN, illustre la solidarité helvétique en matière de sécurité européenne.
La décennie suivante est marquée par l’élargissement de l’OTAN à plusieurs des partenaires d’Europe centrale et orientale ainsi que par le dialogue pragmatique mené avec la Russie dans le cadre du Conseil de Partenariat euro-atlantique (CPEA). A la suite d’une campagne menée par les Etats-Unis au nom de la lutte contre le terrorisme, l’engagement de l’OTAN dans les opérations de stabilisation en Afghanistan occasionne une diversification des Partenariats.
Depuis l’annexion illégale de la Crimée par la Russie en 2014, l’OTAN adopte de nouveau un profil davantage axé sur la sécurité collective. L’approche coopérative, en particulier avec les partenaires qui partagent les mêmes valeurs et sont des contributeurs nets en termes de sécurité comme la Suisse, n’est pas pour autant abandonnée mais appelle, en raison des nouvelles tensions en Europe ainsi qu’en lien à la crise majeure qui affecte les nations du pourtour méditerranéen, à une nouvelle réflexion sur la sécurité coopérative.
20 ans après la décision d’ouvrir une Mission suisse auprès de l'OTAN, l'Europe a beaucoup changé et, avec elle, les collaborations initiées par le Partenariat pour la Paix. Les contacts au plus haut niveau dans le domaine de la politique de sécurité qu’offre un accès privilégié à l'OTAN demeurent un atout essentiel pour la sécurité de notre pays. Sans aucune ambition d'adhérer à l’Alliance, la Suisse reste ainsi connectée de la meilleure façon avec une organisation qui demeure la principale institution de sécurité collective sur le continent européen.