Agir pour la paix grâce à la diplomatie scientifique
La création du CERN à Genève a favorisé, à son niveau, la reconstruction de l’Europe de l’après-Seconde Guerre mondiale. L’initiative, en 1954, était celle du Professeur Herwig Schopper. En 2021, à l’âge de 97 ans, ce sage n’en a pas fini d’œuvrer en faveur de la paix et du développement de la science et travaille sur la création de nouveaux instituts dans les différentes régions stratégiques du monde.
Le conseiller fédéral Ignazio Cassis en compagnie des participants de la conférence dans le cadre du projet SEEIIST. © Keystone
À son ouverture à Genève, à l’initiative du Professeur Herwig Schopper en 1954, le CERN était l’embryon d’un projet qui visait à réunir à nouveau l’Europe et le monde à travers la recherche scientifique dans un contexte marqué par la fin de la Seconde Guerre mondiale. Près de 70 ans plus tard, il se présente aujourd’hui comme l’organisation intergouvernementale témoin d’un nouveau monde où la collaboration entre experts à travers le monde se mettent au service de l’excellence scientifique.
Grâce au CERN, la ville de Genève a bâti une partie de sa réputation en tant que plateforme d’échange à l’international. Il n’a jamais été question de savoir d’où provenaient les nouveaux spécialistes de la recherche nucléaire, mais bien de comprendre quel était leur approche pour développer la science et favoriser, en même temps, un climat de paix dans une Europe à reconstruire.
La vocation du professeur Schopper – agir pour la paix en favorisant la diplomatie scientifique – ne s’est jamais éteinte. À 97 ans, il étudie encore différentes possibilités pour mettre sur pied des projets similaires dans des régions stratégiques du monde. En mai 2017, le projet SESAME, le CERN du Moyen-Orient, a ouvert ses portes en Jordanie après des années de longues discussions. Actuellement, il s’agit d’étudier la possibilité de reproduire le schéma de la création d’un projet similaire en Europe du Sud-Est.
Le SEEIIST, instrument de la diplomatie scientifique dans les Balkans
Le SEEIIST (acronyme de «South East European International Institute for Sustainable Technologies») est un projet de création d’un nouveau centre de recherche scientifique et technologique au centre de la région du sud-est de l’Europe. Ce centre nourrit l’espoir de jouer un rôle de vecteur non seulement dans la recherche biomédicale et nucléaire, spécialisée notamment dans le développement d’une technologie de pointe pour le traitement de certains types de cancers, mais aussi en faveur du développement technologique dans une région stratégique du continent.
Tout comme ce fut le cas lors de la fondation du CERN à Genève en 1954, le projet souhaite réunir en un seul institut les scientifiques les plus expérimentés de la région des Balkans et du sud-est de l’Europe. Il vise à favoriser les dialogues entre spécialistes de différents pays qui n’en auraient pas eu l’occasion différemment.
Développer le traitement du cancer grâce aux nouvelles technologies
Le SEEIIST a reçu un premier soutien politique officiel du gouvernement du Monténégro en mars 2017. Après la signature de la déclaration d’intention en octobre 2017 au CERN, l’initiative a été transformée en un projet régional rassemblant, outre le Monténégro, l’Albanie, la Bosnie-Herzégovine, la Bulgarie, la République du Kosovo, la Macédoine du Nord, la Serbie et la Slovénie. La Croatie et la Grèce, quant à elles, rejoindraient le projet en tant que membres observateurs.
La création d’un centre pour le traitement des cancers utilisant la technologie de l’Hadronthérapie – qui n’est actuellement pas répandue dans l’ensemble de la population de la région – constitue l’une des missions principales du SEEIIST. Elle permet de soigner des cancers radiorésistants et inopérables en bénéficiant des avantages d’un faisceau de particules appelés hadrons. Il s’agit notamment de protons et d’ions carbone.
En ce sens, le SEEIIST a pour ambition de devenir un pôle d’excellence scientifique, au sein duquel la collaboration internationale et régionale est exacerbée. Le développement durable, ainsi que le développement en matière d’éducation, de transfert de technologies, de réseau numérique et de traitement des Big Data y est privilégié. Plusieurs points doivent néanmoins encore être définis.
Une réunion préparatoire en Suisse
Approchée par le Comité directeur du SEEIIST, la Suisse a répondu positivement à la demande d’organiser une réunion de haut niveau entre les différents responsables politiques de la région et d’autres acteurs importants (notamment le CERN et l’Institut Paul Scherrer). Le but est d’une part de faciliter la création de ce centre d’excellence pour la recherche scientifique et d’autre part de déterminer le lieu du site, ainsi que sa forme juridique.
Le 13 septembre 2021, la Suisse a ainsi reçu les ministres et représentants d’État des pays concernés pour des discussions préparatoires. Les délégations ont été accueillies par le conseiller fédéral Ignazio Cassis qui participait à cet événement.
Les professeurs Herwig Schopper (membre honoraire du SEEIST) et Leandar Litov (Président bulgare du comité directeur du SEEIIST) ont pris part aux échanges aux côtés de la Secrétaire d’État Martina Hirayama (SEFRI), le représentant spécial pour la diplomatie scientifique, l’Ambassadeur Alexandre Fasel, l’Ambassadeur Stefan Estermann, Fabiola Gianotti, directrice générale du CERN et le professeur Leonid Rivkin, vice-directeur de l’Institut Paul Scherrer.
La diplomatie scientifique, point central de la Stratégie de politique étrangère de la Suisse
En soutenant le dialogue pour la création du SEIIST, la Suisse entend poursuivre ses efforts dans l’utilisation de la diplomatie scientifique en tant qu’instrument de politique étrangère dans l’intérêt mutuel de la science mais aussi de la diplomatie. Le soutien à un tel projet s’inscrit par ailleurs dans le sillage de la Stratégie de politique extérieure 2020-2023 du Conseil fédéral.